"Cette fois, les maisons ont été brûlées" : A la fuite des affrontements intercommunautaires au Cameroun

Une volontaire de la Croix-Rouge camerounaise se tient debout devant des déplacés internes issus de la crise intercommunautaire qui a frappée plusieurs communautés de la région de l'Extrême-Nord en Novembre 2021. Elle vient de mener une session de focus group pour collecter les feedbacks des personnes à la suite de distribution des produits non-alimentaires

Une volontaire de la Croix-Rouge camerounaise se tient devant des personnes déplacées de la crise intercommunautaire qui a frappé plusieurs communautés de la région de l'Extrême-Nord en novembre 2021. Elle vient de mener une session de discussion de groupe pour recueillir les commentaires des personnes suite à la distribution d'articles non alimentaires.

Photo: Muriel Atsama / IFRC

Les récents affrontements intercommunautaires dans la région de l'Extrême-Nord du Cameroun ont forcé des milliers de personnes à fuir pour sauver leur vie. La Croix-Rouge camerounaise a aidé les personnes touchées dans les communes de Bogo et Pette, avec le soutien du Fonds d'urgence pour les interventions en cas de catastrophe (DREF) de l'IFRC. Écoutez Madi, une mère de 12 enfants de la localité de Maga, qui décrit ce qu'elle a ressenti en étant prise dans la violence, et comment la gentillesse des volontaires aide sa famille à s'en sortir.

"Je m'appelle Madi. Je suis mère de 12 enfants.

Ma famille a toujours vécu à Maga en paix aux côtés d'autres groupes ethniques, même si de temps en temps il y avait des tensions.

Je n'ai jamais imaginé qu'un jour nous devrions partir.

Un soir, alors que mes enfants et moi étions déjà au lit, mon mari est entré précipitamment et m'a demandé de les réveiller. De nouvelles tensions avaient éclaté. Mais cette fois, les maisons étaient brûlées, les gens tués, le bétail volé. Pour sauver nos vies, il nous fallait partir.

Il m'a demandé de prendre les quelques affaires que nous pouvions emporter avec nous et nous sommes partis immédiatement. Vers quelle destination, je ne le savais pas ; mais les cris et les hurlements que j'entendais près de notre maison m'ont convaincu que nous devions partir rapidement.

Nous avons marché avec nos enfants jour et nuit à travers la savane, nous reposant ici et là pour reprendre des forces. Des centaines d'entre nous ont fui cette nuit-là avec les quelques effets personnels que nous avons pu saisir à la hâte. Par la grâce de Dieu, nous avons pu trouver refuge dans la localité de Bogo, à environ 45 km de Maga, où la population hôte nous a accueillis avec de la nourriture et des boissons.

Des tentes ont rapidement été mises en place par les travailleurs humanitaires. Certaines personnes de notre communauté étaient avec nous dans notre camp, tandis que d'autres étaient placées ailleurs, à des kilomètres de là. Mais ce qui comptait, était que nous pouvions enfin nous reposer, dormir paisiblement avec nos enfants et leur permettre de récupérer après de longues journées de marche.

Des volontaires de la Croix-Rouge camerounaise mènent des évaluations post-distribution dans le camp de déplacés internes de BOGO. Les déplacés internes ont bénéficié d'un soutien de la Croix-Rouge camerounaise grâce à un financement DREF de l'IFRC

Des volontaires de la Croix-Rouge camerounaise mènent des évaluations post-distribution dans le camp de déplacés internes de BOGO. Les déplacés internes ont bénéficié d'un soutien de la Croix-Rouge camerounaise grâce à un financement DREF de l'IFRC

Photo: Muriel Atsama / IFRC

Une fois installés, nous avons reçu la visite de plusieurs organisations humanitaires, dont la Croix-Rouge camerounaise. Les volontaires sont allés d'abri en abri pour voir comment nous allions. Ils nous ont expliqué comment garder nos abris propres et comment prévenir les maladies comme le choléra et la COVID-19. Mais surtout, ils nous ont écoutés lorsque nous avons parlé des épreuves que nous avons traversées et de tous les êtres chers que nous avons perdus à Maga.

Quelques semaines plus tard, nous avons reçu une aide de la Croix-Rouge camerounaise. Les volontaires ont distribué des seaux, des casseroles, des couvertures, du savon et des kits de dignité pour permettre à nos filles de s'occuper de leur hygiène personnelle. Nous sommes extrêmement reconnaissants de ce soutien, mais malheureusement, cela nest pas suffisant.

Lorsque nous vivions à Maga, mon mari menait quelques activités qui nous permettaient de subvenir à nos besoins quotidiens. Mais maintenant que nous avons tout perdu et que nous sommes loin des terres qui nous sont familières, nous manquons de nourriture.

L'accès à l'eau potable est un parcours difficile. Nous devons marcher jusqu'à 7 km pour trouver un point d'eau, ce qui est très difficile sans nos ânes pour nous aider.

Nos enfants ne sont pas allés à l'école depuis la crise. Et la nuit, nous partageons notre abri avec beaucoup d'autres personnes car il n'y a pas assez de place. Nous sommes reconnaissants de recevoir la visite hebdomadaire d'infirmières qui viennent voir nos enfants, les vacciner et nous donner des traitements contre les maladies. Et nous espérons recevoir une aide supplémentaire de la part de la Croix-Rouge camerounaise.

Pour l'instant, nous n'envisageons pas de retourner à Maga. Les séquelles de la crise sont trop vives dans nos esprits et la tension n'est pas encore retombée. Nous voulons rester ici pour le moment car nous sommes en sécurité. Mais nous avons besoin de soutien".

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La Croix-Rouge camerounaise, avec le soutien du DREF, a fourni des articles ménagers, de l'eau, des fournitures d'hygiène et des kits de dignité à 299 ménages à Bogo et Pette, en plus de mener des campagnes de sensibilisation sur la prévention des maladies et la culture de la paix. Nous étudions actuellement la meilleure façon d'apporter une aide supplémentaire aux communautés - potentiellement par le biais d'une assistance en espèces.

Josuane Tene, coordonnateur régional de la gestion des catastrophes de l'IFRC, a déclaré à propos de la réponse : "À ce stade, les besoins identifiés sont multiples. Les abris fournis par les partenaires humanitaires ne sont pas suffisants. Beaucoup d'entre eux sont des abris de fortune et à l'approche de la saison des pluies, qui est habituellement très sévère dans cette partie du pays, les personnes affectées ont besoin d'abris sûrs. Elles ont également du mal à se nourrir correctement. L'aide en espèces et le soutien aux moyens de subsistance les aideront certainement à répondre à leurs besoins dans la dignité."

Le Fonds d'urgence pour les interventions en cas de catastrophe (DREF) de l'IFRC est un mécanisme qui permet de débloquer rapidement des fonds pour les Sociétés nationales, afin qu'elles puissent se préparer et répondre à des catastrophes de petite et moyenne ampleur, comme le conflit dans le nord du Cameroun. Vous pouvez faire un don au DREF aujourd'hui pour soutenir des personnes comme Madi.

L'IFRC fournit également un soutien national à la Croix-Rouge camerounaise, et à d'autres Sociétés nationales de la région, par le biais de notre délégation basée à Yaoundé, au Cameroun. Vous pouvez en savoir plus sur ce travail dans notre plan de soutien au groupe de pays (cluster) pour 2022.

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